jeudi 28 août 2008

La Réaction Obsessionnelle comme annexe au trauma

Le tableau clinique du trouble de stress post-traumatique comprend des symptômes spécifiques (ceux univoques qu'on ne rencontre que dans cette pathologie) mais il recouvre aussi un certain nombre de "symptômes non-spécifiques". Ceux-ci peuvent se situer à la croisée de nombreuses pathologies. Chaque symptôme non-spécifique est une annexe, une aile du TSPT. C'est un axe que le sujet traumatisé ne développe pas systématiquement. Parmis ces symptômes, on trouve l'obsession ou "réaction obsessionnelle". Pour étudier ce symptôme non-spécifique au TSPT mais parfois développé par le traumatisé, il est nécessaire de se placer dans le camp de la névrose (névrose obsessionnelle) dans la mesure ou elle l'embrasse et le comprend dans son intégralité. Les fondements de la névrose obsessionnelle nous est apporté par la psychanalise freudienne :

En général, je fais appel aux images poétiques et aux métaphores dans l'optique de vulgariser mes travaux. Mon écriture demeure alors essentiellement "photographique" ou "picturale" : c'est un tableau que j'esquisse en invoquant la couleur des mots.
Dans ce billet-blog, je vais user d'un autre processus de vulgarisation : la radicalisation. Lorsqu'une perspective est radicalisée, les contrastes sont éxagérés, mis en lumière, on se retrouve face à un "tableau" en noir et blanc qui nous aide à y voir clair.


Appropriations, jeu, sadisme et perversité

Dans cette perspective, j'introduis d'abord la notion de trouble obsessionnel compulsif (TOC). Il s'agit du plus radical et de plus contrasté des avatars de la névrose obssessionnelle. Le sujet obsessionnel compulsif est "maniaque radical" : par exemple, quand il ouvre la porte, il l'ouvre et la referme d'abord trois fois, il attache régulièrement les lacets de ses chaussures, il pose ses pieds dans le sens de la longitude des pavés de la rue, il se lave les mains plus que de raison, il arrange tout ce qu'il peut pour que le monde soit "droit", structuré, organisé, etc. Phénoménologiquement, le sujet obsessionnel compulsif comprend, classifie et découpe le monde de manière à ce qu'il soit "droit" et organisé ; le chaos est impossible à intégrer.

On trouve des perspectives obsessionnelles moins radicales : le sujet qui remet les chaussures droites lorsqu'elles sont retournées, un autre qui structure ses rédactions "parfaitement", etc. En termes populaires, on parlera de perfectionnisme et de manies. Derrière chacun de ces processus, se profil une angoisse vis-à-vis de "ce qui risquerait d'échapper" marquée par un complexe du tout-puissant : vouloir tout contrôler, tout arranger.

La névrose est une "scène" que le sujet met en place face à la perte ou à l'échappée. Il y a perte d'objet (perte de l'autre, de son emploi, de foyer, de sa situation, etc). Ainsi le sujet est-il psycho-rigide. En d'autres termes, après avoir subit une perte, après avoir été travaillé et déformé par elle comme peut l'être un morceau de terre glaire, son psychique se rigidifie, se cristalise. Crisalisé, il est fragile tel qu'un désordre, le chaos, l'échapée pourrait le briser : il lui faut contrôler "son monde". C'est dans cette optique que Freud signifiait :

" [...]le sadisme est particulièrement marqué :
il peut être compris comme concomitant de l'emprise sur les fèces,
garante de la propreté. "


Autrement dit, au regard de l'obsessionnel, l'autre n'est pas un sujet, c'est un objet. L'autre est un objet que l'on s'est approprié et avec lequel on joue (sadisme, perversité). L'obsession présente le visage dégénéré du désir et de la libido. Dans un tel tableau clinique, la relation de pouvoir (entre le sujet et "son" objet) est patente. Le jeu avec l'objet figure en outre une activité-rituelle fatiguante, épuisante. Freud reconnaît qu'une telle mise en place (les rituels) usent la libido, et c'est peut-être pour devenir soi-même un objet non-libidineux et apathique - comme une pierre - que le sujet obsessionnel met en scène de tels processus.

On rencontre des sujets traumatisés à tendance obsessionnelle : concrètement, ils mettent en place des "boucles" musicales ou cinématographiques, (se) repassent sans cesse le même sédiment - jusqu'à l'usure, jusqu'à en tout savoir, jusqu'à ce que plus rien n'échappe de la "scène".

Mais une "boucle", par exemple, c'est aussi une berceuse. Elle endort la libido du sujet comme il s'en décharge, elle la contient. Dans cette perspective, la "boucle" et l'obsession en général figure un substitut maternel (un background de sécurité, une fonction de contenance). Dans le cadre du trouble de stress post-traumatique, on peut dire que "comme l'événement traumatique a provoqué une surcharge émotionnelle, il s'en décharge par la suite" ; son objet est son trottoir.

La relation sujet-objet est une négation de l'Autre comme sujet à part entièrre. Il y a néantisation (Sartre).


L'obsession qu'on a bite (habite)

Troué par une perte (névrose), castré de son foyer, de sa femme, de sa situation, etc. le sujet obsessionnel manque à être. Ainsi l'obsession est un processus à double visage : d'abord dans la mesure ou le sujet l'alimente, ensuite dans celle ou elle alimente le sujet. Elle le comble. Autrement dit, un certain nombre d'objet s'accrochent dans sa cavité vide, il tapisse son intériorité en jouant avec son objet.
Selon une autre perspective, l'objet à obsession figure un abrit, le sujet s'y retrouve, c'est son repère. C'est une proppriétés propres aux rituels qu'on habite, qu'on "campe" et desquels on ne veut pas s'arracher. Quant le monde a lâché le sujet traumatisé, c'est dans de tels rituels obsessionnels qu'il cherche du solide, c'est sur un tel terrain (libidineux) qu'il se construit. Il y trouve, en outre, une forme de presence ou de proximité : présence de l'objet qu'on s'est approprié, qu'on a fait sien, qui, maintenant, nous habite et nous comble. Le sujet signifie "je me balade toujours avec mon obsession dans la poche".

Habiter, s'y retrouver, pouvoir se reposer dessus, etc. sont des processus qui assurent une fonction de contenance et narcissique. Effectivement, l'objet des obsessions du sujet assure une contenance dans la mesure ou il est l'hôte de ses débordements libidineux.
Au lieu de donner dans le registre de la rétention, le sujet obsessionel "vomis" l'ensemble de ses désirs pervers dans l'autre, dans l'objet approprié avec lequel il joue et qui figure comme une "boîte à secrets", une boîte de Pandore.

Dans la perspective de ce paragraphe, je relève que l'obsession est un processus qui signifie : jouer sa place, jouer sa place dans l'obsession qu'on à bite. C'est un jeu à bite et à trou.

*

L'autre jour, comme je discutais avec Freud, il m'a dit :

"comme l'événement traumatique troue le tissu conscient et le psychique,
il figure un anus dans le psychique"

2 commentaires:

Anonyme a dit…

bjr,

merci pour touts ces réflexions,
je voulais savoir: comment devient un enfant d'une mère (alors que je ne parle pas de père) un enfant de sexe feminin qui a vécu la perversité instinctive de la mère? merci

ps: votre portrait étant le portrait de ma mère d'autre part j'ai déjà peaufiné et n'y reviendrais pas, trop épuisant, sur la question de la névrose obsessionnelle vous me confirmez ce que j'ai pris pour bon dans mon analyse. Ceci n'est pas dépassé ma compétence présomptueux de ma part, pour ce que j'ai constaté, et je suis dans le fondement.

Bonne journée;
si j'ai une réponse merci

Tenzin Dorje a dit…

Bonsoir,

Désolé, je n'avais pas vu le message avant aujourd'hui.

Je ne pense pas être en mesure de vous donner une réponse. Il y a les grandes notions, les grands principes, mais les trajectoires personnelles n'y sont pas vraiment réductibles (ou dans une moindre mesure). En outre, je ne suis pas sûr de "voir le tableau". Si vous pouviez donner quelques détails, peut-être.